Une rentrée oui, mais pas LA rentrée !

La fédération CFDT Éducation Formation Recherche Publique et le syndicat CFDT de l’Académie de Mayotte (ex Sgen-CFDT Mayotte) conduisent une campagne systématique d’appel direct de chacun de leurs adhérents et sympathisants de Mayotte depuis le passage du cyclone Chido.

C’est sur la base de ces contacts qu’est établie cette synthèse et que sont structurées nos demandes.

Situation matérielle

  • Beaucoup de personnes ne répondent pas : risque que certaines soient décédées, mais incertitude car les personnes qui répondent témoignent de la difficulté d’accéder aux communications téléphoniques et à internet, certaines personnes répondent par SMS plus d’une semaine après avoir été appelées, lorsqu’elles ont enfin de la connexion et la possibilité de charger leur téléphone ;
  • Tout le monde déplore des dégâts matériels au logement et/ou au véhicule : l’enjeu premier est la remise en état ou en sécurité, voire le relogement complet ;
  • Les besoins en équipement vont être importants : même quand le logement n’est pas trop dégradé, l’humidité s’infiltre désormais partout car les toitures sont endommagées et il pleut beaucoup => la moisissure envahit tout, les appareils électroniques et l’électroménager sont le plus souvent hors d’usage, au passage cela signifie que de nombreux agents n’ont plus d’outil de travail (ni sur leur lieu de travail, ni à leur domicile ;
  • Les collègues ont encore peu d’information sur le soutien financier dont ils bénéficieront de l’administration : l’aide exceptionnelle versée à une partie des agents en ce début janvier 2025 ne concerne pas tout le monde, les agents ne disposent pas d’information sur l’action sociale dont ils pourraient bénéficier ;
  • Les personnes qui avaient quitté Mayotte avant le passage du cyclone anticipent de grandes difficultés à leur retour pour se loger, pour se réinstaller ;
  • La sécurité reste une préoccupation forte en particulier pour celles et ceux qui ont été témoins de scènes de pillage

Situation morale

  • Plusieurs collègues témoignent du temps consacré à nettoyer, protéger les bâtiments scolaires, tenter de sauver le matériel encore utilisable, mais aussi à encadrer les enfants qui se regroupent dans ou à proximité des bâtiments scolaires, de la solidarité entre voisins, entre collègues pour partager les ressources et les informations disponibles ;
  • Des personnels de direction et d’inspection ont structuré des boucles d’échange pour prendre des nouvelles des agents et faire circuler des informations ;
  • Le traumatisme du cyclone et des événements depuis ses ravages est grand, pour certains cela fragilise psychologiquement au point de déclencher des crises de panique débouchant sur une prise en charge hospitalière ;
  • toutes et tous décrivent une fatigue intense, le besoin de se ressourcer, de souffler dès que ce sera possible ;
  • Des collègues avaient prévu des déplacement à La Réunion ou en métropole pour voir leur famille et vivent difficilement l’impossibilité de le faire, sans information sur ce que deviennent les billets d’avion qu’ils avaient achetés, d’autres avaient prévus à cette occasion des rendez-vous médicaux et des soins qu’il est difficile d’avoir à Mayotte et sont désireux de pouvoir reprogrammer ces rendez-vous, ces questions les taraudent ;
  • L’angoisse d’apprendre le décès d’une connaissance plus ou moins proche, et d’élèves est forte et fait appréhender le moment de la reprise de l’accueil scolaire ;

Questionnements sur les perspectives

  • le 13 janvier paraît à la fois proche et lointain : proche en termes calendaires, lointain compte-tenu de l’état des bâtiments scolaires, des conditions matérielles et morales de vie à Mayotte ;
  • les personnels qui ne disposent plus de moyens de transport ne savent pas comment ils pourront se rendre sur leur lieu de travail, d’autres savent qu’ils n’ont plus d’outil de travail (bâtiment détruit, matériel informatique hors d’usage) ;
  • angoisse de la découverte de l’ampleur des décès au moment de la reprise avec les collègues qui pourraient manquer, et plus encore au moment de l’accueil des élèves et étudiants dont beaucoup vivaient dans de l’habitat précaire avant le cyclone ;
  • une rentrée oui, mais pas la rentrée ;
  • les personnes ont besoin d’avoir des perspectives sur la suite ;
  • quelques collègues, sans doute les plus traumatisés par ce qu’ils vivent depuis le passage du cyclone Chido ne parviennent pas à envisager la reprise du travail, ni parfois même de continuer à vivre à Mayotte. Ces situations nous paraissent rares, la plupart de nos adhérents se projettent ou tentent de se projeter dans la reprise à Mayotte qu’ils soient mahorais ou non, mais ont besoin de perspectives, de savoir comment ils seront soutenus pour reconstruire non seulement le système éducatif mais aussi leurs propres conditions de vie pour être de nouveau au service de la population ;

Demandes de la CFDT

  • partager avec les organisations syndicales les informations sur le suivi du recensement des agents et de leurs besoins par l’administration ;
  • soutien des services centraux et déconcentrés des autres académies au rectorat de Mayotte afin d’effectuer ce recensement exhaustif des agents de l’académie de Mayotte ;
  • débloquer des fonds de l’État afin de soutenir financièrement tous les agents dans leur réinstallation (logement et son équipement, moyen de transport personnel) au-delà de l’aide exceptionnelle accordée à une partie des agents de l’Éducation nationale ;
  • structurer l’information donnée officiellement aux personnels concernant la préparation du fonctionnement du système éducatif à Mayotte pour la suite de l’année scolaire et universitaire ;
  • prévoir et organiser un soutien psychologique aux personnels dans la durée
  • identifier et accompagner les personnels qui sont trop fragiles pour reprendre le travail dans l’immédiat ;

 

GALLEDOU Yacouba

Secrétaire général Académique

Téléchargement de cet article